Tuesday, January 29, 2013

Lu : Moscou la Rouge, de Carole Thibaut

Suite au spectacle L'enfant, drame rural, de Carole Thibaut, j'ai voulu en savoir plus sur l'auteure et ses productions. Joie de l'amateur et du libriste, les textes sont téléchargeables sur le site de la compagnie Sambre, sa compagnie de théâtre.
J'ai tout de même investi par curiosité dans une édition papier de Moscou la Rouge, sous-titrée Krasnaïa Moskva, de l'auteure.
Il s'agit de discussions entre quatre femmes de différents âges et différentes époques, par tchat, Facebook, Twitter, Skype, par blogs interposés, par lettres manuscrites. Elles parlent de leur vie dans la Russie de leur époque, de leurs soucis, de leurs craintes mais pas seulement. Elles parlent aussi librement de leurs envies, de leurs ambitions et de leurs engagements.
Une soixantaine de pages qui n'ont pas la Russie pour sujet central mais plutôt des réactions de femmes dans cet environnement russe que l'on peut imaginer. Comment elles vivent avec Moscou la Rouge, pour Moscou la Rouge, contre Moscou la Rouge ou simplement malgré Moscou la Rouge. C'est un échantillon d'étude sur l’accommodation de spécimens féminins dans cet environnement au passé et à la politique brutaux, asentimentaux, machistes.

Friday, January 25, 2013

Lu : Dictionnaire insolite de la Roumanie

Je viens de finir ma première lecture du Dictionnaire insolite de la Roumanie, par Diane Chesnais. Je compte bien y revenir, comme dans tout dictionnaire qui se respecte.

La Roumanie est un pays bien surprenant ! Alors que j'ai vécu un an à Bucarest et que j'ai voyagé cinq fois à travers la Roumanie, je peux avouer que plus de 90% du contenu de ce dictionnaire insolite était tout à fait... insolite, pour moi !


Beaucoup de lieux et d'activités insoupçonnés au détour des pages. Pour n'en citer que quelques-uns : le nano-satellite GOLIAT, les volcans de boue, les nobles du pays des Sicules qui transforment leurs anciens manoirs en chambres d'hôtes ou des orchestres de musique classique itinérants.

Je prépare mon prochain voyage en Roumanie et je vais regarder avec attention ce qui, parmi tout ça, se trouvera sur mon chemin :-D

Wednesday, January 23, 2013

Théâtre : L'enfant, drame rural, de Carole Thibaut

Hier soir, c'était théâtre au TAP à Poitiers, avec la pièce L'enfant, drame rural, de Carole Thibaut.


Une histoire inspirée de Sodome. Le village, rongé par tous les vices, commet un acte irréparable : l'abandon d'un enfant. Le refus de l'hospitalité à l'être le plus innocent, le plus humble et le plus sans défense qui soit. Le village finit ruiné par le feu.

J'ai eu un doute quand, à la fin de la pièce, la voix off de l'enfant annonce ce qui s'est passé au village : l'incendie, avec pour seuls rescapés la femme trompée, l'idiote du village qui seule nourrit le petit et le maire-médecin qui seul tente de calmer les ardeurs de chacun et refuse les compromissions. Mon doute : l'auteure cède-t-elle au Deus Ex Machina ?
C'est un peu simple, la voix de l'innocent qui annonce ainsi le jugement de Dieu... les fautifs sont châtiés et les justes sortent du village avant le châtiment. C'est Sodome. Compris en tant que parabole biblique, alors on n'est plus surpris d'avoir un Deus à la fin de la pièce. C'est dans le thème. C'est la Bible qui cède au Deus Ex Machina ;-)

Alors, il faut se poser la question : est-il possible d'écrire une histoire sur un thème biblique sans céder au manichéisme ? Le manichéisme est trop simple. Il veut voir le monde en blanc et noir et la pièce, dès le livret distribué à l'entrée, annonce qu'elle va s'y opposer. Comment Carole Thibaut peut-elle mêler un Dieu qui distribue grâces et châtiments et réfutation du manichéisme ?
Pour y parvenir, elle consacre l'essentiel de sa pièce à l'implication mutuelle de l'ensemble des personnages, du passé et du présent de ces personnages. Toutes leurs histoires se recoupent, avec pour point central la peur du qu'en dira-t-on. Et tous en sont victimes et acteurs. Même le maire-médecin. Gauche et droite (j'ai beaucoup apprécié cette double accusation) via les figures du maçon et de sa patronne.
Il est amusant de constater que l'auteure place le politicien comme le juste. Lui seul accepte d'être victime du qu'en dira-t-on mais refuse d'en faire souffrir les autres.
La femme trompée suit son désir d'une vie entière, son désir d'enfant et part sans trop regarder derrière elle.
L'idiote du village, elle, n'est pas sensible au qu'en dira-t-on. Vu qu'elle a passé sa vie à s'entendre affubler de tous les noms et insulter de toutes les manières...

Pour moi, c'est une réussite. De mal en pis, les villageois affrontent la situation en pensant d'abord au qu'en dira-t-on et finissent par abandonner un bébé. Sans anicroche.


Que puis-je ajouter ?
  • Le texte est édité.
  • Le texte (qui a légèrement changé) est téléchargeable.
  • La mise en scène est excellente et sert bien le thème. On passe sans se rendre compte que deux des acteurs tiennent chacun deux rôles. On visualise bien les lieux sans détail alourdissant.
  • C'était la première fois que je voyais une pièce de théâtre moderne dont l'auteure était à la fois metteure en scène et actrice. Chapeau !
  • Cette pièce est la première partie d'un triptyque qui comprendra aussi L'île, drame insulaire et Cités, tragédie urbaine. Je suis impatient.

Tuesday, January 22, 2013

Lu : Blanche Neige et les lance-missiles

Je viens de finir Blanche Neige et les lance-missiles, de Catherine Dufour. J'en avais déjà parlé.

C'est que j'ai eu un peu de mal à finir ce livre. Drôle, sans le moindre doute, mais j'ai calé.
C'est lié à mon rythme de lecture. Je lis plusieurs livres en même temps et je suis souvent en voyage, il peut donc se passer une ou deux semaines sans que je touche à un livre donné. La difficulté est alors de suivre le fil ténu de la logique de l'histoire, dans cet univers complètement décalé.

Voyons... je ne peux pas dire du mal de ce livre, c'est très Pratchett, très drôle, ça blasphème à tour de bras. J'adore.

Mais, après avoir lu les 7 premiers Disque-Monde et arrêté là, je suis bien forcé de me rendre à l'évidence. Ce style littéraire, quoique très amusant et indéniablement complice de ses lecteurs (moi en particulier), n'est pas ce que je recherche.


Chez Terry Pratchett comme chez Catherine Dufour, il y a une certaine densité d'idées neuves et surtout une certaine densité de reformulations, qui éclairent sous un jour nouveau une idée connue : par exemple, les blasphèmes, la ridiculisation de mythes sacrés : personnages, orthographe, dragons, merveilleux.

Il y a aussi une densité, beaucoup plus faible, d'idées ou de reformulations qui permettent de voir l'humanité sous un angle nouveau. Et c'est davantage ce que je recherche.



J'assume ce jugement « ce n'est pas pour moi » dans sa subjectivité. Qui plus est, il n'est pas absolu. À d'autres périodes, je reprendrai peut-être goût à ces œuvres. Pour aujourd'hui, il me faut autre chose.

« Rien de ce qui est humain ne m'est étranger », disait Montaigne en répétant Térence. Pour ma part, je cherche ces livres, films et autres œuvres qui peuvent me faire explorer les limites et les profondeurs de cette « humanité ».

Saturday, January 19, 2013

Lu : Au tableau !

J'ai achevé, les larmes de rire aux yeux, le recueil Au tableau ! de Frigyes Karinthy (titre original : Tanar ur kerem, littéralement "M'sieur, s'il vous plaît", en hongrois, 1916).

L'auteur, arrivé sur ses 27 ans, revient sur son enfance et écrit son journal intime comme il l'aurait écrit s'il revenait à cette époque. Au menu : son collège, ses camarades de classe, les blagues de potaches, ses professeurs, ses notes, ses blancs quand on l'interroge au tableau, ses cachoteries à ses parents, ses passages à la pâtisserie du coin quand sonne la cloche...
C'est très tendre, drôle et pourtant ça ne s'adresse pas forcément à des très jeunes ou des adolescents. Plutôt à des adultes, une supplique à retrouver l'enfant qui est en eux, à se rappeler les causes de ce qu'ils sont, à ne pas laisser l'amertume aigrir leurs vies.

Pour vous donner l'eau à la bouche, voilà les titres des chapitres :
  1. Introduction
  2. Sept heures du matin
  3. Je suis arrivé en retard
  4. Je vends mon livre
  5. Le bon élève est interrogé
  6. Le mauvais élève est interrogé
  7. L'homme recalé
  8. Composition hongroise
  9. Toute la classe rigole
  10. Mes expériences
  11. J'explique mon bulletin
  12. Les filles
  13. Mon journal
  14. Je pendouille aux agrès
  15. Le conseil de détresse
  16. Mensonges
Une remarque digressive sur l'interculturalité. Contrairement à ce que l'on pourrait penser et à ce que les ennemis de l'Internet chantent à tue-tête, l'interculturalité n'a pas encore atteint un stade où toute l'humanité a accès à toute l'humanité.
Ce livre, Au tableau ! en est l'exemple. Il est très connu et étudié en Hongrie, de façon comparable aux Fables de La Fontaine en France. Et pourtant, sa première traduction en français date de 2012. Et pourtant, sa seule page Wikipedia est en hongrois. Ni anglais, ni français, ni allemand.
Il y a encore beaucoup d'efforts à faire et il y a un gisement de culture et d'emplois dans l'imprégnation culturelle européenne et, a fortiori, mondiale.

Pour finir, mes remerciements à la traductrice et à l'éditeur, sans qui je n'aurais pas découvert cette pépite.

Revu : Taxidermie

Taxidermie, de Gyorgy Palfi, adapté de nouvelles de Lajos Parti Nagy, sorti en 2006, que j'avais eu l'occasion de voir à mon cinéma préféré de Marseille, le Variétés, sur la Canebière.


Ce film comporte des scènes crues, qui peuvent choquer. Je vous conseille de le voir parce qu'il est unique. Fait amusant, l'affiche du film est très variable selon les pays. Ci-dessous, l'affiche américaine :
 et celle de France :
Il faut dire que le film se prête aux affiches spectaculaires, vu le travail du graphisme et les nombreuses scènes uniques dans l'histoire du cinéma.



Ce film, je ne l'ai pas reçu de la même façon en janvier 2013 qu'en 2006.

En 2006, je m'émerveillais devant l'inventivité du réalisateur, devant son culot, je me disais qu'il fallait que je trouve le texte d'origine qui se cachait derrière ce film, je me disais que le fait de rassembler les acteurs et les non-acteurs nécessaires à la réalisation de ce film avait dû être une tâche harassante. Je me demandais la part de génie et la part de névrose chez l'auteur.

En 2013, j'ai pris du recul sur le contenu, certes, qui ne me choque plus autant. Je m'émerveille avant tout sur la qualité symbolique des choix du réalisateur. Je sais que l'auteur du texte d'origine cherche à mettre en valeur l'absurdité de la vie. Quelle réussite !

Un point commun toutefois entre 2006 et 2013, je me dis encore aujourd'hui qu'il faut que je creuse ma connaissance de l'auteur du texte d'origine. On mentionne qu'il est aussi poète en vers. Ça doit être quelque chose ! Mais je ne suis pas sûr qu'il soit traduit et je ne lis pas encore le hongrois dans le texte :-(

Pour ceux qui auraient des difficultés à trouver ce film rare (d'auteur, choquant, hongrois, trois raisons à cette rareté), je dois pouvoir le leur prêter.

Thursday, January 17, 2013

Vu : Le chat du rabbin, 2011

Je viens de voir le Chat du rabbin, dessin animé long métrage issu de la BD du même nom.
Le chat d'une famille juive, après avoir mangé le perroquet familial, acquiert la parole. Il devient alors un acteur et un commentateur amusé et amusant de la vie de son maître et de celle de sa fille.

  - Tu crois qu'il faut pas éduquer tout le monde ?
  - Si, même les ânes il faut ! ... mais sans illusion.

Beaucoup d'humour et de poésie, même pour un film qui parle de religion et d'amitié entre les peuples. J'apprécie beaucoup le trait du dessin, qui reflète un vrai style de dessin personnel, contrairement aux dessins animés des grands studios où la réutilisation, le travail à la chaîne ainsi que la taille et le turn-over des équipes aboutissent à un trait "moyen", dans tous les sens du terme.
Ça m'a donné envie de me procurer la BD ^^