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Monday, March 18, 2024

Lu: Démystifier le vivant, Annabelle Kremer-Lecointre et Guillaume Lecointre, 2023

Lu: Démystifier le vivant, Annabelle Kremer-Lecointre et Guillaume Lecointre, 2023



Recueil de 36 métaphores telles qu'on les entend dans les journaux, les médias en ligne, les discours politiques, sans compter les sermons des vendeurs de superstitions à la dernière mode. Chacune de ces métaphores est méthodiquement démontée à l'aune de la biologie actuelle. Les auteurs proposent en fin de chapitre une nouvelle version de la métaphore, plus correcte, voire la suppression complète de la métaphore pour les plus fausses d'entre elles.

On est ici dans les sciences naturelles, l'observation, l'expérience, la déduction et le refus des compromis. Au fil des chapitres, on chasse ainsi le gradisme, l'anthropocentrisme, l'essentialisme ou encore les téléologismes régulièrement nichés dans la façon dont la biologie nous est, hélas, présentée chaque jour. Au-delà de cet exercice de rigueur scientifique et des notions d'épistémologie distillées tout au long des pages, on est aussi nourri de précisions biologiques sourcées, qui donnent au néophyte que je suis une mise-à-jour bienvenue de savoirs bien minces quant à ces sujets fondamentaux.

Ce qui n'enlève rien au plaisir de la lecture, l'ouvrage est rythmé par des dessins humoristiques pertinemment choisis pour illustrer les idées de chaque chapitre. Au total, un très bel effort que je recommande à tous ceux qui n'ont pas baissé les bras devant le choix des idées et des mots. Le livre est d'ailleurs proposé au prix scientifique de l'Académie Littéraire Bretagne et Pays de la Loire.

Présentation du livre sur le site de l'Association Française pour l’Information Scientifique: https://www.afis.org/Demystifier-le-vivant?fbclid=IwAR2rO55SFZTl_1Df_x1qFPkLKweUlNqAvzweujcsBKWY2jjv59vADOtpsgY


Sunday, July 10, 2022

Lus: Mémoires de Richard Feynman

Lus, aimablement prêtés par une voisine :
- Surely, you're joking Mr. Feynman!
- What do _you_ care what other people think?

Deux recueils d'anecdotes de la vie de Richard Feynman, par lui-même. Il ne s'agit pas à proprement d'une biographie vu que la progression n'est pas chronologique et que de larges pans sont oubliés, il s'agit plutôt de mémoires, visant à édifier les lecteurs sur la science et sur son apprentissage, plaçant la curiosité, le doute et l'expérience au coeur de toute réussite.


Pour ceux qui ne connaîtraient pas, Richard Feynman (1918-1988) était un ingénieur, scientifique et professeur américain influent du XXème siècle, qui a participé très jeune aux travaux de la bombe atomique (il n'avait que 27 lors du premier largage), qui a participé largement aux progrès de la physique fondamentale, en particulier quantique, mais aussi de l'informatique. Il a reçu le Prix Nobel de physique en 1965. Il est aussi très connu pour avoir été un excellent professeur, qui disait que "si vous ne pouvez pas expliquer votre sujet à un élève de première année, c'est que vous ne le maîtrisez pas" et dont les cours sont encore régulièrement re-publiés dans le monde entier (5 tomes en français, que j'ai lus en prépa).

C'était avant tout un esprit curieux et rationnel, qui ne se la laissait pas dicter. Ces deux livres sont pleins d'anecdotes sur son travail académique, non-académique, son travail de professeur, son travail d'ingénieur (mise en pratique des savoirs), et même sa vie personnelle, toujours avec une rationalité et une curiosité extrêmes.

On apprend ainsi comment il se mêle à la communauté italienne de son quartier sans même parler italien, comment il apprend à séduire des femmes dans un casino de Las Vegas, comment il analyse l'explosion de la navette Challenger, comment il remet en cause les coffres-forts utilisés par l'armée, comment il fait changer tout le système d'enseignement supérieur du Brésil en 1 seule conférence, comment il remet en cause une théorie d'Einstein devant Einstein (invité à la dernière minute sans qu'il le sache), comment il apprend le japonais, l'espagnol puis le portugais, comment il décrypte les oeuvres d'art des lieux de débauche de son voisinage, comment il améliore les méthodes de calculs (pré-)informatiques au beau milieu de la fabrication de la bombe nucléaire, comment il a affronté la mort par maladie de sa jeune épouse, comment adolescent les gens de la ville entière venaient lui demander de réparer leurs postes de radios, etc.

C'est un vrai régal à lire, car le coquin ne manque pas d'humour et d'humanité. Le tout en environ 600 pages que j'ai avalées en quelques jours et que je vous recommande.

Wednesday, August 7, 2013

Petit calcul à dose homéopathique

Le terme de médicament convient-il à l'Oscillococcinum ? L'État a tranché, non. Il s'agit d'une "préparation homéopathique". Jetons un œil à sa composition.


Le principe actif est supposé provenir de foie et de cœur de canard de barbarie. 35 grammes du premier et 15 grammes du second pour 1 litre soumis à enzymes. Simplifions grossièrement en supposant qu'il y a effectivement 40 grammes de produit actif dans 1 litre du mélange de base (hypothèse très très optimiste).

Supposons aussi que le produit actif a une masse molaire de 40 000 grammes par mole (hypothèse légèrement optimiste).

Il y a donc 0,001 (1 millième) de mole de produit actif dans 1 litre de la préparation de base. Celle-ci est ensuite diluée selon le principe homéopathique :
  • la dilution se fait au centième,
  • et elle est répétée 200 fois.
On divise donc deux cent fois la concentration de la préparation de base par cent. C'est-à-dire qu'on la divise par 10^400 (un 1 avec 400 zéros derrière). Elle était au départ de 0,001 mole par litre, elle est après cette dilution de 10^-403 mole par litre.

Soyons fair play. On parle ici en moles et non en molécules. Il y a 6x10^23 molécules dans une mole. Exprimée en molécules par litre, la concentration de l'Oscillococcinum est de 6x10^-380 molécules par litre. C'est à dire un zéro, une virgule, 379 zéros et enfin un 6 ou, plus visuellement 0,0000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000000006 molécules dans un litre.

Dit autrement, on peut passer une vie entière à prendre de l'Oscillococcinum tous les jours, plusieurs fois par jour, sans jamais voir passer la moindre molécule de produit actif.

Pour référence, on a environ une chance sur 100 millions de gagner à l'EuroMillions (5 chiffres + 2 étoiles), c'est-à-dire environ  dix millions de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de fois plus de chances de gagner le gros lot à l'EuroMillions que de trouver une molécule utile dans un litre d'Oscillococcinum.

Alors siouplait, si vous n'allez pas bien ou que vos enfants ne vont pas bien, allez voir un médecin.

Saturday, July 27, 2013

L'amour, par Henri Laborit

L'amour

«
Avec ce mot on explique tout, on pardonne tout, on valide tout, parce que l'on ne cherche jamais à savoir ce qu'il contient. C'est le mot de passe qui permet d'ouvrir les cœurs, les sexe, les sacristies et les communautés humaines. Il couvre d'un voile prétendument désintéressé, voire transcendant, la recherche de la dominance et le prétendu instinct de propriété. C'est un mot qui ment à longueur de journée et ce mensonge est accepté, la larme à l'œil, sans discussion, par tous les hommes. Il fournit une tunique honorable à l'assassin, à la mère de famille, au prêtre, aux militaires, aux bourreaux, aux inquisiteurs, aux hommes politiques. Celui qui oserait le mettre à nu, le dépouiller jusqu'à son slip des préjugés qui le recouvrent, n'est pas considéré comme lucide mais comme cynique. Il donne bonne conscience, sans gros efforts, ni gros risques, à tout l'inconscient biologique. Il déculpabilise, car pour que les groupes sociaux survivent, c'est-à-dire maintiennent leurs structures hiérarchiques, les règles de la dominance, il faut que les motivations profondes de tous les actes humains soient ignorés. Leur connaissance, leur mise à nu, conduirait à la révolte des dominés, à la contestation des structures hiérarchiques. Le mot d'amour se trouve là pour motiver la soumission, pour transfigurer le principe du plaisir, l’assouvissement de la dominance. Je voudrais essayer de découvrir ce qu'il peut y avoir derrière ce mot dangereux, ce qu'il cache sous son apparence mielleuse, les raisons millénaires de sa fortune. Retournons aux sources.
»

— incipit de l'Éloge de la fuite, d'Henri Laborit

Sunday, February 24, 2013

Remarque sur les farines animales

Je suis tout prêt à entendre que je me trompe mais je préfère vous livrer mon point de vue sur la question des farines animales.
Pour moi, la distinction entre "herbivore" et "carnivore" n'est pas un élément naturel mais un élément culturel. C'est une classification empiriste et non une "loi". Et la distinction absolutiste entre "herbivore" et "carnivore" n'est pas une affaire scientifique mais une affaire de pédagogie d'école primaire, un reste de notre petite enfance.

D'un point de vue scientifique :
1°/ Je vous mets au défi de trouver une règle ou une définition de "herbivore" qui englobe toute la classification "herbivore" et rien qu'elle. *
2°/ Les différences apparentes à l'échelle humaine sont beaucoup moins flagrantes à l'échelle cellulaire. Protéines, lipides, glucides, fibres... le monde animal et le monde végétal se ressemblent.
3°/ Quand on regarde de près, la plupart des animaux sont omnivores et choisissent leur alimentation en fonction de leurs besoins et, bien sûr, des disponibilités. Ceci est vrai autant pour les insectes que pour les oiseaux ou les mammifères. La frontière la plus mince étant au niveau des mammifères frugivores, dont l'appareil digestif leur permet de se nourrir autant de fruits que de viande. Ils ne s'en privent pas. D'ailleurs, la plupart des singes, primates et l'homme se situent à cette frontière.

Alors, pour moi, farines animales ou farines végétales, c'est du pareil au même.
Bien sûr, on peut s'émouvoir du devenir des animaux ainsi broyés. On peut aussi se rebeller contre l'ignorance complète du public vis-à-vis des pratiques de l'industrie agro-alimentaire. On peut encore regretter le manque de documentation de notre nourriture (pour ne pas utiliser le terme galvaudé de "traçabilité"). On peut enfin de manière générale s'insurger devant l'industrialisation et la déshumanisation du monde agro-alimentaire.
Mais dire "les vaches ne mangent pas de viande donc il faut interdire les farines animales", pour moi ce n'est pas du bon sens, ni de la science, c'est de la bigoterie.

* Pour le compte, je vous mets aussi au défi de trouver une définition de "végétal" qui englobe toute la classification "végétal" et rien qu'elle.

Lu : Le visage de Dieu, d'Igor et Grichka Bogdanov

Repost de mon mur Facebook du 21 oct 2011


Deux contenus scientifiques :
1/ une récapitulation d'un grand nombre d'avancées et de théories sur les débuts de l'univers,
2/ quelques hypothèses défendues par les auteurs. Des perspectives intéressantes et valides. (Je souligne : les questions qu'ils posent me paraissent tout à fait légitimes et les perspectives de réponses qu'ils apportent me paraissent tout à fait intéressantes.)

Par contre, leurs "interprétations" et leurs métaphores me laissent complètement atterré :
1/ Des jugements sans pincettes du type "c'est ainsi" ou des blocages du type "il ne sera jamais possible de..."
2/ Des allusions permanentes à Dieu et à la Genèse là où il n'y a finalement que des théories et des observations physiques (pas étonnant que ça ait fait scandale).
3/ Une confusion permanente entre la causalité "physique" et la causalité "de volonté", sans doute à l'origine du 2/

Je regrette toutefois que la fin du bouquin, cad leurs propositions, ne soit pas plus étayée : dans l'état, le tout peut être résumé en moins d'une page et pas particulièrement argumentée. (A défaut d'observations certes difficiles dans ce domaine, ils auraient tout de même pu montrer un recoupement entre leurs propositions et d'autres éléments de théorie déjà plus "admis"...)

Bref, je reste sur ma faim. C'est vulgarisé sans être vulgarisé, ça a du contenu sans en avoir et je me demande quel était le public ciblé :-s