Version intégrale en livre audio, selon l’édition de référence Brunschvicg (regroupant les fragments de manière thématique). Lecture fluide, permettant de naviguer facilement dans les pensées, qui vont d’une ligne à plusieurs pages.
Les Pensées sont une œuvre posthume de Pascal, mathématicien, physicien, inventeur, devenu philosophe et théologien à la suite d’une série de chocs personnels : graves problèmes de santé, deuils successifs, puis une "nuit de feu" mystique qui le pousse à se retirer dans une forme de christianisme radical, proche du jansénisme. Il ne s'agit pas à proprement parler d’un livre composé, mais d’un projet d’apologie du christianisme laissé inachevé, sous forme de fragments plus ou moins ordonnés, rassemblés après sa mort.
La forme rend la lecture (ou l’écoute) particulièrement accessible : les pensées sont souvent courtes, incisives, formulées dans un style net, presque oral. Le lecteur peut picorer, relire, revenir à certaines idées sans suivre un plan strict. Cette souplesse est sans doute l’un des atouts majeurs du texte — avec son ton péremptoire, parfois provocateur, qui vise à éveiller ou inquiéter l’âme du lecteur.
Mais à la lecture (ou plutôt à l’écoute), une question se pose : Pascal est-il vraiment un philosophe de premier plan ? Pour ma part, j’en doute fortement. Après une brillante carrière scientifique, Pascal semble avoir tout abandonné à la suite de sa conversion : la rigueur, la méthode, l’ouverture intellectuelle. Il entre en philosophie par la voie de la religion, et sa pensée en reste fondamentalement marquée — voire prisonnière.
Son fameux pari est, à mes yeux, une construction intellectuelle indigente, indigne du mathématicien qu’il fut. Réduire la foi à un calcul d’espérance est une trahison des deux domaines — la théologie et la raison. La distinction entre esprit de géométrie et esprit de finesse, souvent vantée, est intéressante mais ni originale ni décisive : on y lit plutôt un aveu de renoncement à la science qu’un vrai prolongement philosophique.
Quant à ses jugements moraux sur les riches, les libertins, les mondains ou encore Descartes, ils relèvent davantage de la déclamation que de l’argumentation. Il condamne, il moque, il juge — mais rarement avec des raisonnements construits. Le traitement réservé à Descartes est révélateur : Pascal semble passer complètement à côté de l’importance de son projet, ce qui traduit à la fois un dogmatisme et une fermeture d’esprit assez déconcertants pour un penseur de son époque.
En fin de compte, les Pensées ont sans doute séduit par leur facilité d’accès (structure fragmentaire, style concis) et leur christianisme fervent, qui ont dû en faire un classique des bibliothèques de "bonnes familles", un compagnon de route des lycées catholiques et des formations "à l’ancienne". Un ouvrage facile à citer, plus impressionnant par sa forme que par la profondeur réelle de sa pensée.
Bref, si vous vous intéressez à la philosophie plus qu'à l'histoire de la philosophie, passez votre chemin.
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