Un livre qui m'a beaucoup plu et je ne suis pas sûr de savoir expliquer pourquoi. En fait, c'est un mix de plusieurs choses :
- L'environnement cyberpunk ou, certains diront, post-cyberpunk. Pour écrire une histoire dans un monde cyberpunk, on est obligé d'inventer ce monde, car il n'est pas donné au lecteur. Donc, invention, description, bonnes idées. Et, comme dans tout roman de SF qui se respecte, la cohérence des idées est primordiale.
- On trouve donc dans ce roman plein de bonnes idées, des concepts intéressants. Prenons-en quelques-uns :
- Le ratcho est un chien de garde cyborg. Un vrai chien de garde, qui aime bien son maîmaître et son nonos, avec des parties robotisées.
- Le dentata est une arme de self-defence anti-violeurs. Dans le vagin de la victime est insérée une seringue qui assomme chimiquement le violeur.
- Le Radeau est un immense ensemble de radeaux, de vieux bateaux, organisés autour d'un ancien porte-avion américain abandonné. Y vivent des exclus de la société. Une vraie favela flottante.
- Les banlises, ou banlieues-franchises, sont des banlieues mises en place par une grande société et où ladite grande société a un monopole généralisé.
- Les deux héros sont sympathiques. Un métis afro-asiatique paumé dans la vie, adepte des sabres japonais et hackeur émérite, et une jeune courrière américaine adepte de la planche.
- L'exploration d'un thème qui m'est cher, la commensurabilité du langage humain et du langage informatique. Tout au long du roman sont développées des histoires de programmes informatiques s'adressant directement à l'esprit humain, sans passer par une traduction dans les langues courantes. La glossolalie y est interprétée comme une pratique visant à court-circuiter la raison.
- L'exploration générale de l'histoire, de la mythologie et de la linguistique par le héros, qui cherche à comprendre comment des virus peuvent s'adresser à l'esprit humain. Là-aussi, rien que pour la culture, je plussoie.
- Le style indirect libre utilisé par l'auteur affiche — éhontément — l'avantage de pouvoir mêler l'omniscience du narrateur et la subjectivité du personnage. C'est une facilité mais cela permet d'abréger un livre très dense qui, autrement, serait beaucoup plus long et fastidieux à lire. De plus, cela engendre une certaine complicité entre le lecteur et le narrateur, soulignée par quelques traits d'humour dans la narration. Encore une fois, c'est bon marché, mais ce n'est pas du Ronsard que l'on recherche dans ce livre ;-)
- J'ajoute que l'auteur a cru bon de nous épargner deux catastrophes des temps modernes (qui ruinent le cinéma américain, entre autres) :
- Les scènes d'action à rallonge.
- Les jugements moraux ou les clichés chrétiens insérés en catimini.